Par Joël Dicker
« Surtout soyez ambitieux ! »
Fatto!!!
GRAND PRIX DU ROMAN DE L’ACADEMIE FRANCAISE 2012 ! / GONCOURT DES LYCEENS 2012
PRIX DE LA VOCATION DE LA FONDATION BLEUSTEIN-BLANCHET 2012
La scène se passe dans l’arrière-salle de la Librairie du Rameau d’Or, à Genève, là où Vladimir Dimitrijevic, légendaire patron des éditions L’Age d’Homme, tient séance tous les samedis. C’est au début de l’année 2011. Quelques semaines plus tôt, Vladimir Dimitrijevic m’a proposé de publier mon premier roman « Les derniers jours de nos pères ». Depuis, je ne cesse de venir le voir pour lui demander « Quand ? » « Comment ? » et toutes ces questions légitimes qui tracassent ceux qui vont voir un de leur texte prendre vie sous forme de livre. Ce jour-là, il me prie de cesser mon cirque du samedi et de ne pas m’inquiéter :
– J’ai édité plus de 4’000 titres dans ma vie, me dit-il. Et vous ? Combien en avez-vous édité ?
– Heu… zéro.
– C’est bien ce que je pensais. Je suis l’éditeur, vous êtes l’écrivain. Allez écrire.
– Justement, je travaille sur un nouveau roman.
– Quel genre ?
– Un roman américain.
Il sourit. Il me parle des Américains. Il me parle de Faulkner et de Wolfe. « Thomas Wolfe, précise-t-il, pas Tom Wolfe ». Je n’ai jamais lu Wolfe, mais je hoche la tête bêtement, de peur qu’il me prenne pour un imbécile.
– Où se situe votre roman ? me demande-t-il.
– En Nouvelle-Angleterre.
– C’est très bien…
Il me raccompagne sur le pas de la porte de la librairie, pour se débarrasser de moi.
Et il me répète : « Surtout soyez ambitieux. »